Renaud Salins
(texte traduit par Sylvie Pigeard)
Dimanches
Si j’essaye de dater avec exactitude le début de notre histoire, Diego, et si curieux que cela puisse te paraître, ma mémoire ne retient pas le jour même où nous nous sommes connus, mais le matin du jour suivant, quand s’ouvrit en moi la première fissure. La toute première, toute petite, minuscule, presque invisible sur cette longue lisière du sentiment. Pour être sincère avec toi, ce dont je me souvins tout d’abord, à mon réveil ce jour-là, ne fut pas notre rencontre mais tout simplement que c’était dimanche et comme tu le sais, je hais les dimanches. Pour moi, ce sont des jours à contre - temps où l’on hésite entre sortir pour parcourir la ville à la recherche d’improbables surprises et rester chez soi à comptabiliser de vieilles rancœurs. Laisse-moi te raconter, (maintenant, nous avons plus de temps qu’il n’en faut pour nous dédier à la tâche douce et pernicieuse de nous raconter le passé), laisse-moi te raconter comment afin d’écourter les dimanches, j’ai bien des fois tenté de me lever plus tard que de coutume. Pourtant, même en réglant le réveil sur midi, je m’éveille toujours dès les premières lueurs de la journée maudite, prévoyant dès l’aube les détails du naufrage dominical qui ne cesse de me guetter. Ce dimanche-là, je restai peut-être une heure à remâcher des contrariétés du fond de mon lit. Ensuite les premiers bruits du matin dans l’immeuble devinrent perceptibles, l’écoulement de l’eau dans les canalisations…
Cliquez ici pour lire la suite