Lielie Sellier
A petits pas
Je rentrai à pas petits pas tout doucement dans notre chambre à la lueur du jour. J’en connaissais chaque recoin, chaque meuble et je pouvais me diriger sans réveiller Paul. L’infirmière lui avait administré comme chaque soir son somnifère plus tôt dans la soirée. Notre chambre sentait l’hôpital. Le bip bip de l’appareil qui permettait à mon mari de respirer normalement nuit et jour rythmait désormais mes nuits. Je m’y étais habituée comme à l’odeur.
Je me souvins du jour de notre mariage un jour d’été ensoleillé, de notre bonheur, des invités de renom, des membres de la Jet Set, des flashs des photographes. Cette phrase de Monsieur le curé : « Je vous déclare mariés pour le meilleur et le pire. »
Paul et moi avions connu le meilleur jusqu’à l’ivresse, fous d’amour, de désir, inséparables, devinant les pensées ou les envies de l’autre sans parler. Toutes ces années, j’avais toujours eu en moi dans le creux de mon ventre une petite peur, une petite voix qui me disait attention un jour le pire pourra arriver. Trop de bonheur, cela peut faire soudainement peur. Paul était insouciant, moi un peu moins mais je ne lui parlais jamais de ma petite inquiétude. Je voulais toujours paraitre légère comme le vent.
Paul enchainait succès sur succès, ses films cartonnaient au box-office. Il avait remporté plusieurs prix d’interprétation. Moi j’enchainais les scénarios, les livres et secondait Paul dans tous ses choix de rôles. Mon mari était un casse-cou, un intrépide. Il tournait lui-même les cascades de ses films sans doublure. Cela me terrifiait mais sur les plateaux je souriais en fumant ou avec un verre à la main. Je fermais les yeux.
Un matin pluvieux sur une route de Province, une cascade mal calculée à bord d’une Porsche a été presque fatale
Paul a été hospitalisé, pronostic vital engagé. C’était un battant, il s’est battu pour moi, pour nous. Il a survécu, paralysé et ne pouvant respirer que grâce à une machine. Le scénario du pire s’était produit. Paul pouvait parler doucement, très lentement. Il était heureux de ne pas être mort car il pouvait encore me regarder, m’entendre, sentir ma peau contre lui, mon odeur. J’avais installé mon bureau dans la chambre, la journée ou le soir j’écrivais à ses côtés. Il me demandait de lui lire les chapitres de mes livres au fur et à mesure. Il me conseillait. Il aimait regarder la vidéo de notre mariage et celles de nos différents voyages à travers le monde plus que sa filmographie.
Une fois par mois j’avais droit à ma journée, ma soirée et ma nuit. Je partais redécouvrir la ville, je déjeunais avec des mes amis, je voyais des expos et le soir j’allais danser dans une boite de jazz à Saint Germain des Près au bras de tendres et séduisants jeunes hommes. Je les écoutais me faire la cour, je paraissais légère, enivrée, évanescente. J’aurais pu découvrir de jeunes corps nus et le meilleur peut être à nouveau. Mais au dernier moment je m’échappais pour retrouver mon refuge « Les Camélias » et mon éternel amour Paul. La voix s’était tue en moi pour me prévenir du pire et un petit refrain la remplaçait : je suis là mon amour. Dans ce vaste monde que nous avions tant parcouru, notre chambre était devenue notre antre. Au-delà du pire, il existait toujours ce lien indestructible qui nous unissait.
Paul et moi avions connu le meilleur jusqu’à l’ivresse, fous d’amour, de désir, inséparables, devinant les pensées ou les envies de l’autre sans parler. Toutes ces années, j’avais toujours eu en moi dans le creux de mon ventre une petite peur, une petite voix qui me disait attention un jour le pire pourra arriver. Trop de bonheur, cela peut faire soudainement peur. Paul était insouciant, moi un peu moins mais je ne lui parlais jamais de ma petite inquiétude. Je voulais toujours paraitre légère comme le vent.
Paul enchainait succès sur succès, ses films cartonnaient au box-office. Il avait remporté plusieurs prix d’interprétation. Moi j’enchainais les scénarios, les livres et secondait Paul dans tous ses choix de rôles. Mon mari était un casse-cou, un intrépide. Il tournait lui-même les cascades de ses films sans doublure. Cela me terrifiait mais sur les plateaux je souriais en fumant ou avec un verre à la main. Je fermais les yeux.
Un matin pluvieux sur une route de Province, une cascade mal calculée à bord d’une Porsche a été presque fatale
Paul a été hospitalisé, pronostic vital engagé. C’était un battant, il s’est battu pour moi, pour nous. Il a survécu, paralysé et ne pouvant respirer que grâce à une machine. Le scénario du pire s’était produit. Paul pouvait parler doucement, très lentement. Il était heureux de ne pas être mort car il pouvait encore me regarder, m’entendre, sentir ma peau contre lui, mon odeur. J’avais installé mon bureau dans la chambre, la journée ou le soir j’écrivais à ses côtés. Il me demandait de lui lire les chapitres de mes livres au fur et à mesure. Il me conseillait. Il aimait regarder la vidéo de notre mariage et celles de nos différents voyages à travers le monde plus que sa filmographie.
Une fois par mois j’avais droit à ma journée, ma soirée et ma nuit. Je partais redécouvrir la ville, je déjeunais avec des mes amis, je voyais des expos et le soir j’allais danser dans une boite de jazz à Saint Germain des Près au bras de tendres et séduisants jeunes hommes. Je les écoutais me faire la cour, je paraissais légère, enivrée, évanescente. J’aurais pu découvrir de jeunes corps nus et le meilleur peut être à nouveau. Mais au dernier moment je m’échappais pour retrouver mon refuge « Les Camélias » et mon éternel amour Paul. La voix s’était tue en moi pour me prévenir du pire et un petit refrain la remplaçait : je suis là mon amour. Dans ce vaste monde que nous avions tant parcouru, notre chambre était devenue notre antre. Au-delà du pire, il existait toujours ce lien indestructible qui nous unissait.